lundi 13 juin 2011

WIPHALA : UNE MISE AU POINT

Toujours le même travail de sape de la part de l'Empire, visant à discréditer de façon mensongère tout ce qui pourrait lui faire ombrage. C'est le prix Nobel Mario Vargas Llosa attaquant la wiphala et prétendant qu'un tel symbole n'a jamais existé au temps des Incas, c'est Maria Rostworowski, de l'Institut d'Histoire Péruvienne et bien d'autres noms encore qui, soit nient que la bannière arc-en-ciel ait été un emblème des Incas, soit assurent que le concept même de bannière n'existait pas à cette époque. J'avais déjà observé ce phénomène en 2008, de la part des créoles du secteur oriental de Bolivie manipulés par les USA en vue de diviser le pays : semer le doute dans les esprits concernant les symboles et la cosmovision andine afin de déstabiliser, ridiculiser et moquer l'indigène. Faire passer toute manifestation de la culture indigène pour du néo-indigénisme. Mais il faut dire aussi que le délire New Age et soucoupiste autour des Incas, les célébrations touristiques de l'Inti Raymi à Cuzco où le carton-pâte remplace l'or et le spectacle la dévotion, les influences théosophistes et confusionistes de la Lucis Trust dans l'entourage de Huanacuni, membre du gouvernement Morales, et bien d'autres facteurs de ce type, comme par exemple l'espoir d'un “retour de l'Inca” en 2012, véhiculé par de nombreux néo-chamanes, tout cela n'aide guère à ce que soit respectée l'ancienne tradition.

La bonne nouvelle toutefois, c'est qu'existent des indigènes formés à la rigueur scientifique et universitaire, tout-à-fait capables de contrer les infamies de la propagande étasunienne en Amérique du Sud, de faire des recherches chez les chroniqueurs métis tels que Garcilaso de la Vega, ou espagnols comme Pedro Cieza de León ou Bernabé Cobo et de décrypter les symboles sur les céramiques et les tissus anciens. La bandera de la identidad andina, étude de Rodolfo Sánchez Garrafa en est un bel exemple.

En France, à l'occasion de l'exceptionnelle exposition de la Pinacothèque de Paris qui se tenait jusqu'au 6 février 2011 et consacrée à l'Or des Incas, le Figaro-Magazine avait dédié aux Rois des Andes un numéro hors-série. Bien entendu, on ne pouvait espérer d'une telle publication qu'elle fût exempte de propagande anti-andine. Le dossier du Figaro-Magazine présente de très nombreuses erreurs. On y lit par exemple que "le drapeau arc-en-ciel des Incas a été inventé dans les années 1970" et qu'il s'inspirerait de la bannière des homosexuels et du New Age. L'éditorial de M. de Jaeghere tourne l'incaïsme en dérision et fait passer cette culture pour une sorte de fascisme extrêmement violent, toutes informations contredites par les chroniqueurs espagnols eux-mêmes.
Plutôt que d'entrer dans les détails et les grands exposés, je reproduis ici deux images, avec l'accord des amis du Mouvement Thunupa qui me les ont aimablement procurées. La première représente un vase cérémoniel inca, un kero conservé au musée archéologique de Cuzco. On y voit un guerrier tenant un drapeau en forme de Wiphala, ce qui montre clairement que celle-ci n'est pas une invention contemporaine des dangereux anti-impérialistes andins. La seconde met en évidence qu'au-delà même de l'incaïsme, la wiphala est un symbole encore plus ancien, puisque cet objet, une chuspa pour la coca remarquablement conservée, n'appartient pas à la culture Inca mais à celle de Tiwanaku. Il est la propriété actuelle du musée de Brooklyn (USA).
En consultant l'article documenté de Rodolfo Sanchez Garrafa et plus particulièrement les passages où il interroge les chroniqueurs, le doute n'est guère possible : “ Ils consacrèrent une quatrième salle à l'arc-en-ciel, parce qu'ils avaient compris qu'il procédait du soleil, et pour cette raison les Rois Incas le prirent comme devise et blason, parce qu'ils s'honoraient de descendre du soleil “ (Inca Garcilaso de la Vega). On sait dès lors à quelles sources s'abreuvent les propos du Figaro-Magazine, tout comme ceux de Vargas Llosa. Des sources politico-impériales plutôt que scientifiques.

Cependant, le mal est fait et continue d'être fait en tous domaines. Laissez proférer des mensonges par les "sommités au-delà de tout soupçon" et il en restera toujours quelque chose. Ce qui devrait nous rappeler bien d'autres situations, n'est-ce pas ?

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